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Le recensement, un bon score pour la décentralisation




par Pierre Richard, président du Crédit Local de France.


Le Monde du vendredi 20 août 1999


Les premiers résultats du recensement montrent l'émergence d'une « autre France » moins jacobine, au développement territorial plus équilibré. Paris ne règne plus sur la province et, dans la plupart de nos régions, commencent à se constituer des pôles de croissance puissants. La richesse d'un pays vient de la multiplicité d'initiatives autonomes, et nous tenons là les premiers signes d'une décentralisation réussie.


(...) Bien sûr, la population française reste majoritairement, faudrait-il dire massivement, urbaine : près de 80% des Français résident en ville. Bien sûr, l'lle-de-France conserve une supériorité écrasante, puisqu'elle regroupe 18.7% de la population totale.


Bien sûr la désertification démographique du territoire continue de s'accentuer sur un croissant central de la Champagne-Ardenne au Limousin et à l'Auvergne. Toutefois on constate une profonde modification des tendances générales qui dessine un processus de rééquilibrage entre Paris et les grandes métropoles régionales et indique l'essor d'un habitat périurbain.


(...) Le cas de l'Ile-de-France est étonnant : elle reste certes la première région française, et la région la plus dynamique de la Communauté européenne. Mais elle perd des habitants à un rythme désormais non négligeable ; plus d'un demi million de Franciliens ont ainsi émigré vers d'autres zones de notre territoire depuis 1990, ce qui représente une augmentation massive des départs par rapport à la période 1982-1990 (dix fois plus).


La concentration en Ile-de-France n'est donc pas un fait inéluctable ! Au-delà des effets de seuil liés à l'hyperconcentration, il faut d'abord y voir, me semble t-il, l'impact des politiques d'aménagement du territoire impulsé au cours des années 70. Des secteurs entiers d'activités, et non des moindres ont en effet réussi le pari de leur implantation en province : les télécommunications dans l'Ouest de la France, l'aéronautique dans le Sud-Ouest.


Mais cette déconcentration découle aussi de profondes transformations de notre espace de vie ; je citerai deux points essentiels, d'une part le processus de construction européenne qui conduit à renforcer le développement des zones frontalières et des routes situées le long des axes de communication, d'autre part les mutations économiques et technologiques actuelles qui favorisent une redistribution spatiale des activités : le TGV, le développement des liaisons aériennes à bas prix, Internet, le développement du télétravail et du travail à temps partiel, tous ces facteurs modifient en profondeur notre mode de vie, fondé désormais sur la liberté de choix en tous domaines.


Or la mobilité toujours plus grande des hommes, des entreprises et des capitaux qui en résulte remet sérieusement en cause la notion de localisation. Il n'est pas rare qu'un analyste financier, un professeur d'université ou un créateur d'entreprise Internet, réside à 500 km de son « lieu de travail » où il se rendra trois jours par semaine. Qui pourra prédire aujourd'hui la carte des services de demain, quand la distance effective compte moins que l'accessibilité et la durée du temps de transport ? Rappelons qu'il faut aujourd'hui plus de temps pour traverser la capitale que pour se rendre de Paris à Lille.


Ainsi, le recensement montre l'émergence de métropoles régionales où les taux de croissance, à une ou deux exceptions près, sont supérieurs à 7% (la moyenne nationale étant proche de 3.4%). La décentralisation a permis à certains pouvoirs locaux de rivaliser avec la capitale, et donné aux élus les moyens d'améliorer la compétitivité et l'attrait de leur territoire.


Certes nos métropoles ne rivalisent pas encore avec celles de l'Allemagne ou de l'Espagne, par exemple. Mais la France est néanmoins en train d'augmenter le rayonnement de ses grandes villes, Paris bien sûr, Marseille, Lyon, Toulouse, Strasbourg, Montpellier, Nantes, Bordeaux et Rennes....


(...) L'émergence de l'agglomération en milieu urbain, et des pays en zone rurale, peut nous fournir l'axe dominant de la recomposition nécessaire de notre organisation administrative. (...)Il est urgent de cesser d'adopter, et d'imposer, des schémas d'organisation territoriale à l'identique sur tout le territoire: ainsi, ne pourrait-on concevoir une « Alsace » qui rassemblerait les compétences de la structure régionale actuelle et des deux départements ? Ne pourrait-on, en faisant un véritable « département-agglomération », donner consistance au « Grand Lyon », ce qu'il est déjà en termes de rayonnement économique?


Certes, ceci ne correspond pas à la vision uniforme et stratifiée de notre organisation actuelle, mais cette proposition donnerait une impulsion nouvelle à la décentralisation: les compétences seront mieux gérées sur des territoires mieux découpés, mieux organisés, plus en phase avec les réalités socio-économiques du pays. Les structures territoriales doivent pouvoir vivre, se modifier, se réorganiser constamment. C'est ce que font les entreprises aux prises avec la concurrence, c'est ce que doivent pouvoir faire nos collectivités locales si elles veulent améliorer l'efficacité globale de la nation française.



Pierre Richard est président du Crédit local de France et de Dexia.



Faire l'exercice cartographique


Capturé par MemoWeb ŕ partir de http://perso.club-internet.fr/mecfou/redistri/recensem.htm  le 25/10/2003